Si cette nouvelle décennie s’annonçait pleine de promesses, de nouveaux, membres, François Thiry et le retour de Bernard Simons, une nouvelle salle et un immense succès avec notre 51ème pièce « Une Famille Modèle » nous dûmes, hélas, vite déchantés.
La pandémie de covid-19 et le décès de notre Président Jacques Van den Broecke nous plongèrent dans une profonde tristesse.
Mais très vite, le théâtre Royal des Parenthèses releva la tête et dès mars 2020 nous entamions les répétitions du Mariage de Melle. Beulemans via teams
2021 sera l’année « Jacques Van den Broecke » c’est en hommage à son immense talent que nous jouerons « Le Mariage de Melle. Beulemans ». Jacques Dehasse, Albert Meerschaut et Benoit Friederich viendront rejoindre notre troupe à cette occasion.
Après deux années de « covid » nous avons eu le plaisir d’inaugurer l’espace Agora et plus particulièrement la salle « Marcel Thiry » le fondateur de notre théâtre. 1448 spectateurs sont venus nous applaudir pour « Le Mariage de Melle.Beulemans ».
Un grand moment de théâtre à Saint Trojan
Nous avons assisté à un évènement ce vendredi 27 mai, alors que Saint Trojan recevait, comme chaque année à la même époque, les membres du comité de jumelage de la ville belge de Kraainem.
Selon la coutume, ces deux institutions de Kraainem que sont la troupe du Théâtre royal (depuis 2019) des Parenthèses et le Cercle des arts participent alternativement à ces rencontres saint-trojannaises, les années paires pour l’un, impaires pour l’autre. Cette année était celle de la troupe du théâtre, qui s’y préparait avec d’autant plus de ferveur que la tournée de jumelage de 2020 avait dû être annulée en raison de la crise sanitaire.
La troupe avait pourtant commencé à préparer ce qui devait constituer sa 52ème pièce, intitulée "Le mariage de Mademoiselle Beulemans". Elle persista néanmoins à répéter "en distanciel" pendant le confinement et se sentit encore plus motivée dans la poursuite courageuse de ses efforts qu'elle résolut de surmonter ainsi la tristesse de la disparition, à la fin de l’année 2022, de son truculent Directeur, Jacques Van den Broecke.
C'est dans le tragique de l'adversité que se révèlent les grandes destinées et qu'aux âmes bien nées vient le courage de faire jaillir le comique qui reste le sel de la vie.
Assurément, la mise en scène du "Mariage de Mademoiselle Beulemans" en a magistralement administré la preuve.
Cette pièce en trois actes de Frantz Fonson et Fernand Wickler, dont la première représentation à Bruxelles remonte à 1910 et qui influença Marcel Pagnol, est non seulement un joyau du théâtre de boulevard, avec ses quiproquos, ses amours contrariées, ses embrouilles familiales, ses soubrettes à la langue bien pendue, ses retournements et ses happy ends, c'est aussi une plongée dans le monde des notables bruxellois de la Belle époque, imbus de leur importance mais dont l'humanité transparait avec ses faiblesses et ses grandeurs, le tout distillé non sans une forme d’autodérision où l'humour parfois corrosif cède en réalité devant la gentillesse, au rythme de l'accent de la "Zwanze" (le "bien parlé" bruxellois dont le charme savoureux n'a d'égal, cela va de soi, que celui du patois saintongeais).
"Distillé" est le mot qui convient car c'est d'abord une histoire de brasseurs, Beulemans et Meulemeester (merci de prononcer avec l'accent), qui s'entendent pour faire leurs affaires en arrangeant le mariage de leurs enfants. Sauf que la fille du premier "a un boentje" (comprenez "en pince ") pour un français venu apprendre le métier (lui au moins parle français) et que le fils du second… a une connaissance dont il reste amoureux au fond de lui et à laquelle, de surcroit, il a fait un petit garçon qui a de jolies "krolles" (des boucles) dans les cheveux.
Et la magie du théâtre de nous plonger sans transition dans cette atmosphère typiquement et délicieusement bruxelloise qui nous fait tout soudain oublier que nous sommes en France dans la salle polyvalente de Saint Trojan.
La magie du théâtre et surtout le talent des acteurs, qui se disent amateurs avec une modestie que trahit la maîtrise consommée de leur art et certainement aussi le plaisir gourmand de brûler les planches pour nous régaler d'un spectacle drôle et chaleureux.
Que dire en effet de Suzane Beulemans, Nathalie Beniest flamboyante du début à la fin dans son personnage de jeune fille toute dévouée à la cause paternelle et prête à accepter les convenances d'un mariage de raison mais qui, fine mouche, comprend peu à peu que les circonstances lui ouvrent des horizons dont elle saura habilement tirer le meilleur parti… car elle est de ces femmes auxquelles on ne peut rien refuser.
Que dire du promis, Séraphin Meulemeester, Thierry Peclers totalement habité par la cocasserie inénarrable de ce fils de famille, successivement glorieux et penaud, écartelé entre le devoir et l'amour, toutefois plus bouffon à la façon de Molière que héros racinien, qui se laissera finalement convaincre de rester fidèle à ses premiers émois… et de libérer la place.
Que dire des pères, Beulemans, et Meulemeester, tour à tour remarquables d'authenticité et de densité, Daniel Alexander, d’une part, tout en aisance et en rondeur avec ses manières débonnaires d'industriel opulent, colérique ce qu’il faut pour corriger l’honnête homme, et Sam van de Kerckhof, d’autre part, corseté dans sa dignité de négociant arrivé, âpre et prompt à l’emportement quand il y va de son honneur, pense-t-il, mais tout de même rejoint par le passé de ses propres errements.
Sans parler de Madame Beulemans, Michelle Schellings, parfaite d’élégance et de maintien dans l’expression de ses attributs de maîtresse femme comme de mère attentionnée ainsi que de ses attributions de maîtresse d’intérieur comme d’épouse vigilante.
Ni de sa domestique Isabelle, Joëlle Debue, dont la composition désopilante dissimule derrière une pittoresque caricature de servante son rôle de deus ex machina puisque c’est elle qui, au terme d’une tirade entrecoupée de sanglots (feints ?), fera (naïvement ?) la lumière sur les petits secrets de famille.
Ni des honorables membres de la puissante Société Royale des Brasseurs, tous campés dans leur lourdeur compassée par des acteurs s’employant à merveille, chacun avec son style, pour illustrer la suffisance ampoulée et empourprée des uns, la déférence solennelle et rubiconde des autres, la pépie de tous quand les bières sont servies.
Et comment ne pas finir sur les deux figures non belges mais non moins attachantes, celle d’Albert Delpierre, amoureux pudique et respectueux mais dont la flamme dévoile le poète passionné, venu de Paris pour faire son apprentissage et la connaissance de sa future aimée, incarné avec une retenue qui tient du brio par Bernard Simons, et celle de son père, auquel Eric Wils prête la crédibilité de son allure altière et bienveillante.
Du grand théâtre magnifiquement interprété dans des costumes d'époque et des décors directement apportés pour l’occasion de Kraainem.
Au fait, cet esprit jovialement moqueur qui traverse "Le mariage de Mademoiselle Beulemans" ne fait-il pas écho à ce tempérament charentais volontiers facétieux qui fleurit avec un bonheur particulier en notre belle île ? O l’é tou pas à cause que nos emits belges de Kraainem se r’trouvant tant beunaize cheut nou z’aut’ oléronais de Saint Trojan ?
Guy Martinet
Saint-trojannais d'adoption
En 2022 nous avons eu le plaisir de jouer « La Maison du lac » d’Ernest Thompson et à cette occasion nous avons eu la joie d’accueillir au sein de notre troupe trois jeunes pleins de talent que nous aurons plaisir à revoir bientôt : Jules Chanekune, Charles Lebrun et Adrien de La Grandville. 1280 spectateurs ont été ravis de notre prestation et nous avons renoué avec la tradition puisque nous avons, après deux années de COVID, rejoué pour le Rotary Wezembeek-Oppem -Kraainem et l’ADA (Aide au développement de l’Afrique).
En 2023 nous avons joué « Les hommes préfèrent mentir » d’Eric Assous. 1150 spectateurs et les débuts au sein de notre troupe de Julie Lemmens au talent plus que prometteur.